C’est
vrai que ça fait longtemps que je ne t’ai pas appelé « Tonton », mais plus familièrement
par ton prénom : « Albert ».
Ton
parcours d’homme, de paysan commence, à St Andéol, le 5 septembre 1921, tu viens au monde dans la petite ferme
familiale du Pontay. Tes parents, Maria et Gabriel ont déjà deux filles :
Gabrielle et Elise, Elise était ma mère. Ton enfance, c’est l’enfance de tous
les petits paysans, l’école communale de six à douze ans, les vaches et les
chèvres qu’il faut aller garder en rentrant et tous les petits travaux qui
étaient dévolus aux gamins de cette époque. A douze ans, tu quittes l’école, il
faut maintenant travailler. Dans les années trente la mécanisation de
l’agriculture n’en est qu’à ses débuts, l’essentiel du travail se fait à la
main, les foins, la moisson et la traite du troupeau.
Tu
as dix huit ans quant la guerre se déclare et tu commence à gagner quelques
sous en allant tuer des cochons dans les fermes et comme tu es passionné de mécanique, tu
t’achèteras une moto qui tombe en panne assez régulièrement et le plus
souvent il te faudra aller de ferme en ferme à pied avec la caisse de couteau à
l’épaule. C’est un travail dur mais ça te plait, tu en rapporteras pas mal
d’histoires assez savoureuses que nous aimions t’entendre raconter.
La
guerre c’est aussi l’occupation et la collaboration. Dans la famille Viron on n’aime pas beaucoup
Pétain, le père Gabriel avait ramené de Verdun un éclat d’obus dans l’épaule et
beaucoup de ressentiment à l’égard des gradés planqués à l’arrière. Ces mêmes gradés qui gagnaient leur galon en
faisant massacrer la jeunesse de nos campagnes. C’est pour cela que pendant ton
séjour dans les Chantiers de Jeunesse, tu seras plus enclin à mettre la
pagaille qu’à chanter : « Maréchal, nous voilà ».
Après
la guerre, l’hiver, tu reprendras la « charcuterie à domicile », mais
maintenant, tu as un associé, Marcel, qui deviendra ton beau frère en 1949. Car
c’est en 49 que tu épouseras Denise (qui est aussi la sœur de mon père).
Toujours
passionné par la mécanique, tu ne tarderas pas à t’acheter une voiture et un
tracteur. C’est deux vénérables engins te seront trouvé par Pierre, le mari de
ta sœur Gabrielle qui a un garage à St Vallier. La voiture, c’est une Chrysler
avec des roues à rayons, et dans mon souvenir, aussi haute qu’une armoire. Les
lundis, tu descendais tous les habitants du quartier au marché de St Donat, car
il y en avait de la place dans ce véhicule… Le tracteur c’est un Deering à
pétrole et j’étais le roi du monde quant tu me mettais assis à tes cotés sur le
garde boue.
Avec
Denise, vous travaillerez dur sur la ferme familiale, les gros travaux se font
avec de l’entraide, entre voisins, mais il y a aussi le travail quotidien, la
traite, le tabac, la basse cour, la maison…Michel nait en 1953 et Jacqueline en
1957 et vous aurez à cœur de leur donner une solide éducation, même s’il faut
pour cela faire des sacrifices. Une longue vie de travail. « Une année bonne et l'autre non, Et
sans vacances et sans sorties… » Comme le chante si justement Jean
FERRAT.
Une
vie de travail, mais qui a aussi ces petits plaisirs, la chasse avec Léopold et
René, les veillées et les petits plats que Denise mitonnait le dimanche avec
vos enfants et petits enfants autour de la table.
Puis
vient le temps de la retraite, une retraite dont Denise ne profitera pas beaucoup, emportée
par une maladie impitoyable. Pour toi, la retraite ce ne sera pas l’inactivité,
l’oisiveté n’a jamais fait bon ménage dans votre maison. Sur ton John DEERE,
dans les champs où dans les bois, la tronçonneuse à la main, tu trouveras
toujours quelque chose pour t’occuper.
Pour
certains, il y a une vie après la mort, pour les autres tout s’arrête à ce
moment là. Mais pour tous ceux qui t’ont côtoyé, croyants ou non croyants, tu
continueras de vivre dans nos cœurs, même si nous ne croiseront plus, sur nos
chemins, ta silhouette familière.
Reposes
en paix Tonton, reposes en paix Albert,
1 commentaire:
merci pour ton discours ANNIE
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